Le 30 mars 2011, par Geneviève Koubi,
Les dispositions du décret n° 2011-340 du 29 mars 2011 portant création d’un traitement de données à caractère personnel relatif à la gestion de l’information et la prévention des atteintes à la sécurité publique ne sont pas sans rappeler les rebondissements que connut EDVIGE et laissent toujours CRISTINA dans les nimbes du secret.
Mais ce nouveau traitement connaît les mêmes caractéristiques que CRISTINA puisqu’il est mentionné à l’article 1er du décret n° 2007-914 du 15 mai 2007 pris pour l’application du I de l’article 30 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. La liste doit être remise à jour, après STARTRAC institué par un décret n° 2011-279 du 16 mars 2011. De ce fait, les fichiers suivants ne sont pas connus par d’autres que les personnes habilitées à le consulter : CRISTINA ; les fichiers d’informations nominatives mis en œuvre par la direction générale de la sécurité extérieure ; les fichiers de la direction de la protection et de la sécurité de la défense ; le fichier d’informations nominatives mis en œuvre par la direction du renseignement militaire ; le traitement automatisé d’informations nominatives mis en œuvre par la direction de la protection et de la sécurité de la défense ; le “fichier de la DGSE” et le fichier du personnel de la DGSE, tout deux mis en œuvre par la direction générale de la sécurité extérieure ; le traitement automatisé d’informations nominatives de personnes étrangères mis en œuvre par la direction du renseignement militaire ; l’application relative à la prévention des atteintes à la sécurité publique ; STARTRAC.... et maintenant par ce décret, le fichier de gestion de l’information et la prévention des atteintes à la sécurité publique.
Or, l’article 1er de ce décret n° 2011-340 du 29 mars 2011 suscite maintes interrogations du fait de sa "césure".
En effet, d’une part, en un premier alinéa, il est dit que le traitement de données à caractère personnel « dénommé gestion de l’information et prévention des atteintes à la sécurité publique » a « pour finalité de recueillir, de conserver et d’analyser les informations qui concernent des personnes dont l’activité individuelle ou collective indique qu’elles peuvent porter atteinte à la sécurité publique » ; et d’autre part, en un second alinéa, il est simplement signalé que ce traitement « a notamment pour finalité de recueillir, de conserver et d’analyser les informations qui concernent les personnes susceptibles d’être impliquées dans des actions de violence collectives, en particulier en milieu urbain ou à l’occasion de manifestations sportives. »
Le "notamment" a une saveur particulière. Il a pour conséquence de permettre que soient pris en considération d’autres types de situations, d’autres formes de manifestation (de rue), d’autres cas de figure impliquant des signalements spécifiques... Comment se repèrent les « personnes dont l’activité individuelle ou collective indique qu’elles peuvent porter atteinte à la sécurité publique » ?
Dans ce fichier, sont enregistrées des données à caractère personnel tenant, par exemple, au "motif de l’enregistrement", aux "informations patrimoniales", aux "activités publiques, comportement et déplacements ; aux "agissements susceptibles de recevoir une qualification pénale ; aux "personnes entretenant ou ayant entretenu des relations directes et non fortuites avec l’intéressé"...
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Et puisque nous sommes désormais tous fichés, il nous resterait à savoir dans lequel de ces fichiers chacun de nous l’est [1] !
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[1] V. aussi, au même JO du 30 mars 2011 : D. n° 2011-341 du 29 mars 2011 portant création d’un traitement de données à caractère personnel intitulé « gestion des sollicitations et des interventions » ; D. n° 2011-342 du 29 mars 2011 portant création d’un traitement de données à caractère personnel relatif à la sécurisation des interventions et demandes particulières de protection. A propos de ce dernier, il s’agit d’un traitement qui « a pour finalité de collecter des données destinées à une gestion des interventions des forces de gendarmerie adaptée soit aux personnes dont la dangerosité ou l’agressivité, à travers des manifestations de violence physique ou verbale, a été déjà constatée lors d’une précédente intervention, soit aux personnes demandant une intervention ainsi qu’aux personnes se trouvant dans une situation de vulnérabilité particulière ».