Le 9 août 2014, par Geneviève Koubi,
Sans relever les différentes actualités juridiques qui ont traversé les derniers jours de juillet 2014, et sans s’attarder sur le fait que l’économie sociale et solidaire ne se lit qu’en termes d’entreprise privée, puisque, selon l’article 1er de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire [1], elle s’appréhende comme « un mode d’entreprendre et de développement économique adapté à tous les domaines de l’activité humaine auquel adhèrent des personnes morales de droit privé »...
... bien que Droit cri-TIC ne soit pas encore tout à fait en passe de se réanimer sur la Toile, trois textes peuvent être signalés avant que ne sonne la rentrée que certains prédisent ’difficile’ [2]...
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1/ Paru au Journal officiel du 6 août 2014, le décret n° 2014-879 du 1er août 2014 relatif au système d’information et de communication de l’État, ce système étant « composé de l’ensemble des infrastructures et services logiciels informatiques permettant de collecter, traiter, transmettre et stocker les données sous forme numérique qui concourent aux missions des services de l’État » confirme la mainmise du Premier ministre sur les stratégies qui lui sont corrélatives.
Toutefois, les systèmes d’information opérationnels et les systèmes de communication du ministère de la défense de même que les systèmes d’information scientifiques et techniques placés sous la responsabilité du délégué général pour l’armement et les systèmes d’information d’administration et de gestion placés sous la responsabilité du secrétaire général pour l’administration demeurent sous la responsabilité du ministère de la défense (chef d’état-major des armées, délégué général pour l’armement et secrétaire général pour l’administration). Ainsi, « les systèmes qui font intervenir, nécessitent ou comportent des supports ou informations classifiés (...) restent sous la responsabilité des ministres concernés ».
Dès lors, mêmes placés sous la responsabilité du Premier ministre, certains des composants du système d’information et de communication de l’État relèvent de la responsabilité des ministres concernés, ce « dans la mesure requise pour l’exercice de leurs attributions ».
L’article 1er du décret n° 2014-879 du 1er août 2014 relatif au système d’information et de communication de l’État précise cependant que cette responsabilité n’est pas déléguée, « sauf décision du Premier ministre », lorsque sont en cause les services : « 1° Infrastructures informatiques ; 2° Réseaux de communication ; 3° Services numériques d’usage partagé ; 4° Systèmes d’informations relatifs à des fonctions transversales des administrations de l’État ».
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2/ Publiée au Journal officiel du 5 août 2014 et devant n’entrer en vigueur qu’au 1er janvier 2015, la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire intrigue et suscite une interrogation sur les résidus d’un service public ferroviaire. A l’ère de la contractualisation, la logique intrinsèque du service public décline.
Au début du livre Ier de la deuxième partie du Code des transports, la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire introduit un Titre Préliminaire intitulé « Système de transport ferroviaire national ».
Le premier article de ce titre, l’article L. 2100-1 dispose : « Le système de transport ferroviaire national est constitué de l’ensemble des moyens humains et matériels mis en œuvre pour assurer : / 1° La gestion du réseau ferroviaire défini à l’article L. 2122-1 ; / 2° L’exécution des services de transport utilisant ce réseau ; / 3° L’exploitation des infrastructures de service reliées à ce réseau. // Le système de transport ferroviaire concourt au service public ferroviaire et à la solidarité nationale ainsi qu’au développement du transport ferroviaire, dans un souci de développement durable. Il participe à la dynamique, à l’irrigation et à l’aménagement des territoires. Il concourt au maintien et au développement de la filière industrielle ferroviaire et des bassins d’emploi sur l’ensemble du territoire. Il contribue à la mise en œuvre du droit au transport défini au livre Ier de la première partie du présent code. »
L’article suivant, l’article L. 2100-2, annonce que « l’État veille à la cohérence et au bon fonctionnement du système de transport ferroviaire national. Il en fixe les priorités stratégiques nationales et internationales. Dans le respect des principes d’équité et de non-discrimination, il assure ou veille à ce que soient assurés : / 1° La cohérence de l’offre proposée aux voyageurs, la coordination des autorités organisatrices de transport ferroviaire et l’optimisation de la qualité de service fournie aux utilisateurs du système de transport ferroviaire national ; / 2° La permanence opérationnelle du système et la gestion des situations de crise ayant un impact sur le fonctionnement du système ainsi que la coordination nécessaire à la mise en œuvre des réquisitions dans le cadre de la défense nationale et en cas d’atteinte à la sûreté de l’État ; / 3° La préservation de la sûreté des personnes et des biens, de la sécurité du réseau et des installations relevant du système de transport ferroviaire national ainsi que la prévention des actes qui pourraient dégrader les conditions de sûreté et de sécurité du fonctionnement du système de transport ferroviaire ; / 4° L’organisation et le pilotage de la filière industrielle ferroviaire, notamment la conduite ou le soutien de programmes de recherche et de développement relatifs au transport ferroviaire, en vue d’en accroître la capacité à l’exportation, la sécurité, l’efficience économique et environnementale, la fiabilité, le développement technologique, la multimodalité et l’interopérabilité ; / 5° La programmation des investissements de développement et de renouvellement du réseau ferroviaire défini à l’article L. 2122-1 et des investissements relatifs aux infrastructures de service et aux interfaces intermodales ; / 6° La complémentarité entre les services de transport ferroviaire à grande vitesse, d’équilibre du territoire et d’intérêt régional, en vue de satisfaire aux objectifs d’un aménagement et d’un développement équilibrés et harmonieux des territoires et de garantir l’égalité d’accès aux services publics ; / 7° L’amélioration de la qualité du service fourni aux chargeurs, notamment par un accroissement de la fiabilité des capacités d’infrastructure attribuées au transport de marchandises, dans un objectif de développement de l’activité de fret ferroviaire et du report modal. »
Quoiqu’il en soit, plus loin, plusieurs articles révèlent les modalités de contractualisation des entités créées pour remédier (si peu !) au démantèlement des services ferroviaires suscité par la segmentation des activités. Ainsi, au chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du Code des transports, les articles L. 2111-9 et L. 2111-10 invitent à prendre la mesure d’un établissement public national industriel et commercial dénommé SNCF Réseau, tandis qu’au chapitre Ier du titre IV du livre Ier de la deuxième partie du Code des transports les articles L. 2141-1 et suivants convoquent l’entrée d’un autre établissement public national, lui aussi ’industriel et commercial’, dénommé SNCF Mobilités. SNCF n’est plus un sigle, c’est une marque.
,/ Sur le premier point, l’article L. 2111-9 est modifié en conservant la référence à la notion de service public. Il désigne SNCF Réseau, établissement public national à caractère industriel et commercial, comme « le gestionnaire du réseau ferré national », il dispose ainsi que cet établissement « a pour missions d’assurer, conformément aux principes du service public et dans le but de promouvoir le transport ferroviaire en France dans une logique de développement durable : / 1° L’accès à l’infrastructure ferroviaire du réseau ferré national, comprenant la répartition des capacités et la tarification de cette infrastructure ; / 2° La gestion opérationnelle des circulations sur le réseau ferré national ; / 3° La maintenance, comprenant l’entretien et le renouvellement, de l’infrastructure du réseau ferré national ; / 4° Le développement, l’aménagement, la cohérence et la mise en valeur du réseau ferré national ; / 5° La gestion des infrastructures de service dont il est propriétaire et leur mise en valeur. ». Pour mieux encadrer ces missions, il est précisé que « Sa gestion vise à une utilisation optimale du réseau ferré national, dans des objectifs de sécurité, de qualité de service et de maîtrise des coûts et dans des conditions assurant l’indépendance des fonctions mentionnées au 1°, garantissant une concurrence libre et loyale et l’absence de toute discrimination entre les entreprises ferroviaires. » Plus encore, sous prétexte d’éviter les déséquilibres mais profilant des externalisations, cet article ajoute que « Pour des lignes à faible trafic ainsi que pour les infrastructures de service, SNCF Réseau peut confier par convention certaines de ses missions, à l’exception de celles mentionnées au 1°, à toute personne, selon les objectifs et principes de gestion qu’il définit. »
L’article L. 2111-10 confirme la mise en perspective de la contractualisation. Il dispose : « SNCF Réseau conclut avec l’État un contrat d’une durée de dix ans, actualisé tous les trois ans pour une durée de dix ans. Le projet de contrat et les projets d’actualisation sont soumis pour avis à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires... ».Ce contrat doit permette la mise en œuvre de « la politique de gestion du réseau ferroviaire et la stratégie de développement de l’infrastructure ferroviaire dont l’Etat définit les orientations. Il s’applique à l’intégralité du réseau ferré national et détermine notamment : /1° Les objectifs de performance, de qualité et de sécurité du réseau ferré national ; / 2° Les orientations en matière d’exploitation, d’entretien et de renouvellement du réseau ferré national et les indicateurs d’état et de productivité correspondants ; / 3° La trajectoire financière de SNCF Réseau (...) ; / 4° Les mesures correctives que SNCF Réseau prend si une des parties manque à ses obligations contractuelles et les conditions de renégociation de celles-ci lorsque des circonstances exceptionnelles ont une incidence sur la disponibilité des financements publics ou sur la trajectoire financière de SNCF Réseau. (...) ».
,/ Dans le second temps, l’article L. 2141-3 prévoit que « SNCF Mobilités conclut avec l’État un contrat d’une durée de dix ans, actualisé tous les trois ans pour une durée de dix ans. Ce contrat détermine notamment les objectifs assignés à l’entreprise en matière de qualité de service, de trajectoire financière, de développement du service public ferroviaire et du fret ferroviaire, d’aménagement du territoire et de réponse aux besoins de transport de la population et des acteurs économiques ».
Deux autres articles soulignent une notion particulière qui mériterait d’être retravaillée, celle de contrat de service public. L’article L. 2141-15-1 du Code des transports dispose : « Les biens immobiliers utilisés par SNCF Mobilités pour la poursuite exclusive des missions prévues par un contrat de service public peuvent être cédés à l’autorité organisatrice compétente, qui les met à disposition de SNCF Mobilités pour la poursuite des missions qui font l’objet de ce contrat de service public. Cette cession se fait moyennant le versement d’une indemnité égale à la valeur nette comptable, nette des subventions versées par ladite autorité organisatrice. » L’article L. 2121-4-1 use d’une même référence : « Les matériels roulants utilisés par SNCF Mobilités pour la poursuite exclusive des missions prévues par un contrat de service public peuvent être repris par l’autorité organisatrice compétente, qui les met à disposition de SNCF Mobilités pour la poursuite des missions qui font l’objet de ce contrat de service public. Cette reprise se fait moyennant le versement d’une indemnité égale à la valeur nette comptable, nette des subventions versées par ladite autorité organisatrice. Elle ne donne lieu à aucun versement de salaire ou honoraires, ni à aucune perception d’impôts, de droits ou de taxes de quelque nature que ce soit. »
Dans l’ensemble de la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire, l’appel à la notion de service public reste limité. Cependant à l’article L. 2131-1 du Code des transports, il y est encore fait référence … mais en y associant les pratiques concurrentielles, - ce qui est logique puisque cet article concerne l’Autorité de régulation des activités ferroviaire, autorité publique indépendante. Cette autorité « concourt au suivi et au bon fonctionnement, dans ses dimensions techniques, économiques et financières, du système de transport ferroviaire national, notamment du service public et des activités concurrentielles, au bénéfice des usagers et clients des services de transport ferroviaire. Elle exerce ses missions en veillant au respect de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, notamment des objectifs et dispositions visant à favoriser le développement des modes alternatifs à la route pour le transport de marchandises. »
Tandis que l’article L. 2121-8-1 reproduit l’idée de ’service d’intérêt régional’ (tels que signalés à l’article L. 2121-3 du Code des transports [3]) : « Lorsqu’un service d’intérêt régional fait l’objet d’une convention avec SNCF Mobilités, SNCF Mobilités ouvre à l’autorité organisatrice compétente l’ensemble des données qui décrivent ledit service, notamment les arrêts et les horaires planifiés et temps de trajet réels des trains, ainsi que les parcs de stationnement dont elle a la responsabilité, pour intégration dans les services d’information du public mentionnés à l’article L. 1231-8. »
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3/ Désormais, du fait du décret n° 2014-888 du 1er août 2014 relatif à l’armement professionnel et par l’ajout d’un simple alinéa à la fin de l’article R. 511-12 du Code de la sécurité intérieure, alors que la liste des armes autorisées s’allonge [4], « Les agents de police municipale sont également autorisés à porter les munitions et les systèmes d’alimentation correspondant aux armes qu’ils sont autorisés à porter. »
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[1] JO 1er août 2014.
[2] Ont été exclus de cette présentation, des textes qui sembleraient de plus grande importance et qui, en tant que tels, ne manqueront pas d’être commentés dans des revues spécialisées - ex. : loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, loi n° 2014-891 du 8 août 2014 de finances rectificative pour 2014, décret n° 2014-883 du 1er août 2014 relatif à l’observatoire de la récidive et de la désistance, arrêté du 31 juillet 2014 relatif aux exportations de gaz lacrymogènes et agents antiémeute vers les pays tiers...
[3] : « Des services ferroviaires régionaux de personnes, qui sont les services ferroviaires de personnes, effectués sur le réseau ferré national, à l’exception des services d’intérêt national et des services internationaux ; / 2° Des services routiers effectués en substitution de ces services ferroviaires ».
[4] : « Les agents de police municipale peuvent être autorisés à porter les armes suivantes : /1° 1°, 3°, 6° et 8° de la catégorie B : a) Revolvers chambrés pour le calibre 38 Spécial ; b) Armes de poing chambrées pour le calibre 7,65 mm ; c) Armes à feu d’épaule et armes de poing tirant une ou deux balles ou projectiles non métalliques, classées dans cette catégorie par arrêté du ministre de la défense et dont le calibre est au moins égal à 44 mm ; d) Pistolets à impulsions électriques ; e) Générateurs d’aérosols incapacitants ou lacrymogènes ; /2° a et b du 2° de la catégorie D : a) Matraques de type "bâton de défense" ou "tonfa", matraques ou tonfas télescopiques ; b) Générateurs d’aérosols incapacitants ou lacrymogènes ; c) Projecteurs hypodermiques ; /3° 3° de la catégorie C : Armes à feu tirant une ou deux balles ou projectiles non métalliques, classées dans cette catégorie par arrêté du ministre de la défense et dont le calibre est au moins égal à 44 mm. »