Le 14 décembre 2010, par Geneviève Koubi,
Les circulaires administratives les plus récentes ne sont plus postées ’à temps’ sur le site "circulaires.gouv.fr". Alors que ce site avait pour vocation de porter "immédiatement" à la connaissance des citoyens les principales lectures du droit et les modes d’appréhension des phénomènes sociaux, il semble ne pas être activé suivant cette problématique.
Comme les bulletins officiels des ministères renvoient vers le site "circulaires.gouv.fr", les circulaires administratives retournent dans la catégorie des textes "souterrains". En dépit de l’obligation faite aux ministres de publier leurs circulaires sur ce site, à peine d’illégalité ou d’inopposabilité, les textes administratifs que sont les circulaires, paraissent désormais de plus en plus difficilement accessibles. Et même le Premier ministre s’affranchit de cette obligation ! C’est le cas pour la circulaire du 6 décembre 2010 relative au chantier national prioritaire 2008-2012 pour l’hébergement et l’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées [1]. La connaissance de ces textes essentiels à la compréhension du système administratif français ne passerait désormais que par le biais de la presse...
En ces temps froids qui voient tomber la neige, se multiplient les circulaires les unes pour évoquer les actions humanitaires, les autres pour penser des plans de secours, d’autres encore pour gérer les questions de circulation routière, etc. Comment les capter ? comment en connaître la teneur ? On pourrait, certes, admettre que les circulaires ministérielles adressées au corps préfectoral n’aient pas systématiquement à être diffusées et publiées sur le site ’circulaires.gouv.fr’, mais ce ne saurait être le cas qu’en certaines matières. En des matières qui ne concernent pas les citoyens ou les collectivités territoriales, mais quelles seraient-elles ? La fermeture ne se justifierait alors, sous toutes réserves, que pour les circulaires qui ne concerneraient que les relations entre l’Etat et ses services déconcentrés, et peut-être seulement sous la forme de ’notes de service internes’ [2].
Si les circulaires préfectorales ne sont pas de celles devant être publiées sur le site du Premier ministre, peut-être serait-ce grâce aux sites des préfectures que certaines informations substantielles pourraient être délivrées aux citoyens comme aux collectivités territoriales, mais aucune obligation n’a été émise en ce sens. L’information juridique et administrative dépend donc de l’attention que la presse lui porte.
Et, c’est le cas pour la circulaire du 11 décembre 2010 relative à la préparation et à la gestion des épisodes neigeux. Même non diffusées sur le site consacré aux circulaires, les mesures pointant les rigueurs de l’hiver doivent être sues, entendues, comprises par tous, — ne serait-ce que parce qu’elles situent les possibles mises en jeu de la responsabilité de l’Etat en la matière.
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La circulaire du 11 décembre 2010 sur la préparation et la gestion des épisodes neigeux rappelle certaines données essentielles quant la tenue des cartes de vigilance par les services météorologiques [3]. Ces cartes de vigilance météorologique sont adressées à l’ensemble des autorités nationales ou locales, déconcentrées et décentralisées — dans ce dernier cas, les informations sont ciblées, notamment lorsque des collectivités territoriales se trouvent être dans le circuit des prévisions météorologiques. Elles permettraient alors « d’anticiper les conséquences sur la sécurité des populations d’un événement météorologique ». Il existe plusieurs types de carte de vigilance, chacune étant mise à jour régulièrement.
Pour ce qui concerne le temps qu’il fait, le temps qu’il fera..., Météo France en produit une colorée au moins deux fois par jour. La circulaire du 11 décembre 2010 décode les gradations des couleurs du vert au rouge allant du moindre danger au plus grand danger, en termes de "risques", et signifiant que « les conseils de comportement sont systématiquement associés aux cartes de vigilance. »
Mais, face aux incertitudes climatiques, lorsque l’orange apparaît, toute vigilance doit être redoublée. Le passage au rouge est toujours possible. Dès lors, les préfets doivent être en mesure « de réagir au plus vite et d’adapter le dispositif de sécurité et d’intervention ». Le ministre détermine cinq thèmes autour desquels l’action de chaque préfet est agencée : une prise de contact avec Météo France pour les bulletins de suivis ; la mise en place d’un dispositif de veille ou de gestion de crise, notamment en relation avec les services de police, de gendarmerie et de secours, qui pourrait, le cas échéant, être rapidement activé comme, par exemple, le plan de salage et de déneigement dont la mise en place s’évalue en fonction de l’intensité du phénomène annoncé — ce module exige aussi des contacts avec les collectivités locales et les sociétés d’autoroute — ; un système de communication pour des remontées immédiates d’information sur la situation des personnes prises dans la nasse de l’évènement climatique (bloquées dans la neige, surprises par la montée des eaux, etc.).
Le ministre tire de ces données trois principes d’anticip-action : - Une anticipation et une vigilance maximale, dès lors qu’un phénomène neige/verglas de niveau orange est annoncé par Météo France. - Une anticipation et une programmation des moyens spécifiques d’intervention, mais aussi des services de sécurité et de secours. - Une remontée d’informations du terrain très rapide, afin d’adapter les mesures de circulation et d’intervention.
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La circulaire n’est donc pas (pas encore ?) accessible à tous...
Pourtant, elle concerne directement les citoyens. Ces derniers sont pris en considération principalement sur les voies publiques, et plus particulièrement lorsqu’ils entrent dans la catégorie des ’automobilistes’. Les piétons ne sont pas directement visés par la circulaire ( !).
Ainsi, le ministre rappelle aux préfets « qu’il est indispensable de communiquer en amont sur les modalités de mise en oeuvre du plan de salage et de déneigement afin d’informer les automobilistes des portions du réseau routier qui seront traitées en priorité ou fermées à la circulation ». Les anticipations présentées en ’principe d’action’ supposent aussi que le préfet « informe dans les meilleurs délais les maires ainsi que la population » et qu’il ait les moyens d’une « connaissance en temps réel aussi précise que possible de la situation (afin de) pouvoir porter assistance immédiatement à toute personne en situation de détresse ».
N’aurait-il pas été utile de porter à la connaissance du public cette circulaire ? Mais peut-être est-ce parce que s’annoncent les départs en vacances, qu’il faudrait faire silence...
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[1] V. Gk, « De l’abri au logement, des mots sans actes ».
[2] Encore que... A relire le décret n° 2008-1281 du 8 décembre 2008 relatif aux conditions de publication des instructions et circulaires, ces notes portant instructions devraient tout autant y être postées...
[3] Lesquels n’auront appris que par les quotidiens que, lors d’une réunion à huis-clos, le Premier ministre regrettait, en quelque sorte, avoir critiqué leurs prévisions...