Le 24 juin 2013, par Geneviève Koubi,
Une proposition de résolution en hommage à Aimé Césaire a été adoptée ce 24 juin 2013 par l’Assemblée nationale [1].
L’exposé des motifs de cette résolution, déposée pour célébrer le centenaire de la naissance de Aimé Césaire (le 26 juin 1913, à Basse-Pointe, en Martinique), réunit le poète solitaire et le député-maire. Homme de lettres, et homme d’action, homme de conviction et homme politique (maire de Fort de France de 1945 à 2001, député de la Martinique de 1945 à 1993), Aimé Césaire a « contribué à l’éveil de la conscience internationale en militant contre le colonialisme et contre toutes les formes d’abaissement de la dignité humaine ».
La lutte contre le colonialisme ne se réduit pourtant pas à un combat contre ses méfaits comme le présente cet exposé. Relire le Discours sur le colonialisme d’Aimé Césaire ne serait pas inutile afin de ne pas enfermer l’amplitude de sa pensée dans un cadre débarrassé des questions sociales. Reprendre son Discours sur la négritude serait tout aussi utile pour ne pas travestir sa réflexion sur les dérives aliénantes d’un monde ’bourgeois’. Évoquer alors le « prix des luttes pour la décolonisation » en le rattachant à la lutte contre l’esclavage et dans le but d’annoncer sa contribution à la construction de la « citoyenneté reconnue pour tous, et surtout de l’égalité reconnue pour tous dans le respect des différences », paraît anachronique.
Quoiqu’il en soit, l’enjeu de cette résolution est de rappeler que l’égalité de tous les citoyens de la République s’entend aussi par la valorisation des différences et des identités. Cette proposition de résolution en hommage à Aimé Césaire est alors conçue par son auteur comme « un juste rappel que le développement des sociétés humaines doit et peut se faire dans le respect du pluralisme culturel et des équilibres de la planète ; que toute idée d’humanisme ne saurait se départir d’une inscription plus humble et plus ouverte dans l’ensemble du Vivant ; que la multiplicité des cultures et des civilisations produites par l’espèce humaine constitue une richesse offerte à tous ; que l’unité républicaine peut parfaitement s’accomplir dans la diversité ; enfin, que l’égalité des citoyens de la République demande à se réaliser dans le respect valorisé des différences et des identités ». .
Ce qui se retraduit dans la résolution adoptée en ces termes :
« Considérant que les atteintes aux Droits de l’Homme sont souvent fondées sur un refus des différences ; / Considérant le principe d’Égalité comme une valeur fondamentale de la République, auquel il ne saurait être porté atteinte ; / Considérant le niveau de complexité que nous atteignons dans les rapports contemporains entre les cultures, les civilisations, les religions, les individus ; / Considérant que cette complexité nous oblige à prendre davantage en compte les rapports entre les notions d’unité et de diversité ; / Considérant l’importance des équilibres inédits à trouver pour que nos sociétés, désormais imprégnées de cultures plurielles, puissent connaître un meilleur vivre-ensemble ; / Considérant que réaffirmer solennellement le principe de l’Égalité peut libérer les initiatives, stimuler la créativité individuelle et collective, favoriser le respect des différences, des diversités, des opinions et des convictions de chacun, et participer, au total, à un vivre-ensemble national plus ouvert et plus juste ; / Considérant que l’unité dans une diversité parfaitement valorisée, complètement assumée, est au fondement même de la République tout comme aux tréfonds du vivre-ensemble des hommes, des peuples, des cultures et des civilisations ; / Considérant que la République permet une meilleure intégration de la diversité des situations dans son fonctionnement égalitaire ;
Demande :
1. Que, dans le prolongement de la pensée d’Aimé Césaire, le pluralisme culturel, condition universelle de l’émancipation de l’Homme, soit valorisé de toutes les manières possibles afin que les responsabilités individuelles et collectives soient bien mieux assurées ;
2. Que la capacité des Départements et Régions d’Outre-mer d’exercer des responsabilités et de prendre des initiatives soit renforcée, sans remise en cause de leur acquis et de leur égalité au sein de la République, pour leur permettre de mener leurs projets à terme et d’assurer leur rayonnement dans une pleine valorisation de leur identité, de leurs singularités et de leurs différences. »
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C’est donc le point 2 de la résolution qui devrait faire l’hommage... - s’il n’y avait cette constante d’un refus de remise en cause d’une politique encore et toujours colonialisante...
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[1] V. par ailleurs, le site dédié.