Le 1er octobre 2014, par Geneviève Koubi,
D’abord conçus à l’attention des ’consommateurs’, notamment pour leur information sur les biens et produits qui leurs sont proposés comme pour leur sécurité à cet égard, les labels relèvent de politiques publiques spécifiques qui engrangent indicateurs et critères et s’appuient sur des classements diversifiés. « Ainsi un label public (ou un processus de certification) procure une information sur une ou plusieurs caractéristiques d’un produit, notamment quand le marché n’est pas capable de la fournir de manière spontanée. La puissance publique dans de nombreux pays définit de manière plus ou moins contraignante le cadre réglementaire pour les labels de l’agriculture biologique, les appellations d’origine, les éco-labels, les labels sur le bien-être animal ou encore les labels pour des produits contenant des organismes génétiquement modifiés (OGM). » [1]
Alors que les labels étaient surtout pensés dans les circuits de production et de consommation, depuis nombre d’années, accordés à différents référentiels, ils s’inscrivent désormais dans d’autres domaines touchant aussi bien aux positionnements professionnels qu’aux activités culturelles, s’insérant tant dans les sphères sociales que dans les relations administratives. Mais se jouant souvent entre normes économiques et normes éthiques, les labels révèlent des tactiques discursives dont la portée évolue suivant les acteurs ; en effet, l’attribution d’un label suppose suivi et contrôle et le label lui-même n’est jamais définitivement acquis.
Les labels sont de texture diversifiées mais quels qu’ils soient (agroalimentaire [2], industriel, commercial ou social [3]), ils sont toujours suspendus à une notion de « qualité » inhérente aux fonctions du « marché ».
La dimension stratégique de la création d’un label n’est donc pas neutre puisqu’elle implique des différenciations substantielles même si ces dernières ne sont parfois que de façade. Les indicateurs choisis peuvent aussi bien répondre à des stratégies de conformité qu’à des stratégies d’évitement ou de manipulation. Car l’adoption de ces labels peut également « relever d’une stratégie offensive (la norme étant alors une forme d’innovation, faisant barrière à l’entrée et justifiant des investissements importants) ou d’une stratégie défensive (comme masque, affichage, façade, couverture juridique, etc.) » [4].
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Certes, dans le domaine de l’éducation, certains labels ont déjà été institués. Maintenant, par un décret n° 2014-1100 du 29 septembre 2014 est créé officiellement le label « campus des métiers et des qualifications » [5].
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Trois articles du Code de l’éducation en précisent les données (art. D. 335-33 à D. 335-35).
Art. D. 335-33. « Le label “campus des métiers et des qualifications” permet d’identifier, sur un territoire donné, un réseau d’acteurs qui interviennent en partenariat pour développer une large gamme de formations professionnelles, technologiques et générales, relevant de l’enseignement secondaire et de l’enseignement supérieur, ainsi que de la formation initiale ou continue, qui sont centrées sur des filières spécifiques et sur un secteur d’activité correspondant à un enjeu économique national ou régional. / Le réseau auquel est attribué le label regroupe, par voie de convention, des établissements d’enseignement du second cycle du second degré, des établissements d’enseignement supérieur, des centres de formation d’apprentis, des laboratoires de recherche, des organismes de formation continue, des entreprises et, le cas échéant, des associations à caractère sportif, culturel ou d’entraide. Dans sa gouvernance, il comprend au moins un établissement public local d’enseignement du second cycle du second degré et un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, auxquels peuvent s’associer les parties précitées. / Il offre un service d’hébergement et des activités associatives, culturelles et sportives. / Les formations accueillent des élèves, des étudiants, des apprentis ou des stagiaires de la formation professionnelle. » [6]
Art. D. 335-34. « Le recteur d’académie et le président du conseil régional proposent conjointement à la labellisation des projets de campus des métiers et des qualifications, après consultation du conseil académique de l’éducation nationale et du comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles. / Le label “campus des métiers et des qualifications” est attribué après l’examen des projets de campus par un groupe d’experts et l’avis du conseil national éducation économie, au regard des dispositions de l’article D. 335-33 et du projet pédagogique, liant formation, recherche et développement économique. / Il est délivré, pour une durée de quatre ans, par arrêté conjoint des ministres chargés de l’éducation nationale, de la formation professionnelle, de l’enseignement supérieur et de l’économie. Cet arrêté fixe la liste des campus des métiers et des qualifications et précise l’intitulé de chacun. Cet intitulé doit comporter le secteur d’activité concerné ainsi que, le cas échéant, la mention de la dimension internationale des formations. / Le label peut être renouvelé dans les conditions définies aux alinéas précédents. »
Art. D. 335-35. « Le groupe d’experts est composé de deux présidents de conseil régional ou leur représentant, deux recteurs d’académie ou leur représentant, un représentant des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, un représentant de l’Association des régions de France, deux inspecteurs généraux de l’éducation nationale, un inspecteur général de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche, deux représentants de la direction générale de l’enseignement scolaire, deux représentants de la direction générale pour l’enseignement supérieur et l’insertion professionnelle, un représentant de la direction générale pour la recherche et l’innovation, deux représentants de la direction générale de la compétitivité de l’industrie et des services, deux représentants de la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle. Le président est désigné par les ministres chargés de l’éducation nationale, de la formation professionnelle, de l’enseignement supérieur et de l’économie. »
[1] J. M. Crespi, S. Marette, « Politique de label et commerce international », Rev. économique, 2001/3, p. 665.
[2] A l’exemple du ’label rouge’.
[3] Alors reliés à des ’codes de conduite’.
[4] V., Y. Pesqueux, « La responsabilité sociale de l’entreprise : un dialogue sans interlocuteur ? », Vie sociale 3/ 2009, p. 137.
[5] V. Communiqué du 14 octobre 2013, sur le site du ministère de l’éducation nationale : « Les campus des métiers et des qualifications au cœur du redressement productif des territoires ».
[6] Exemples : métiers de l’aéronautique entre autres en Provence-Alpes-Côte d’Azur ; métiers des travaux publics en Nord-Pas-de-Calais ; métiers de l’habitat, des énergies renouvelables et de l’éco-construction en Languedoc-Roussillon ; métiers de l’énergie en Rhône-Alpes ; etc.