Le 2 février 2009, par Geneviève Koubi,
La loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités dite loi "LRU" avait fait l’objet de vives contestations justifiant des "blocages" de nombreuses universités que les représentants des UFR de Droit n’approuvaient guère, son prolongement logique quant au statut des enseignants chercheurs qui en ressortirait, a fait l’objet de résistances plus acharnées par les mêmes et, paradoxalement, de négociations plus alambiquées de la part des représentants des sections Droit du CNU... Par-delà le site de Sauvons l’Université ! (SLU), plusieurs sites internet ont été créés, sur des initiatives individuelles, pour rendre compte des motifs de ces luttes et des raisons de ces atermoiements [1].
Les actions engagées paraissent cependant "décalées", peut-être volontairement, par rapport au large mouvement social qui a fédéré les mécontentements du secteur public comme du secteur privé, le 29 janvier 2009. En effet, ne répondant pas à la solidarité attendue de l’appel à la grève du 29 janvier 2009, c’est à la date du 26 janvier 2006 qu’était décidée une première grève "in situ", par le mécanisme de présence sur place et par le biais d’une "explicitation" auprès des étudiants d’un projet de décret qui les concerne en tant qu’il les transformerait en consommateur de savoir ou en client d’un service public ( ?) désormais dépourvu de tout "droit à un enseignement de qualité". Se démarquant ainsi par rapport aux autres mouvements de contestation — contestation d’un système juridique aux changements frénétiques et aux allures réformistes quelque peu régressives qui décompose les quelques acquis que les luttes des travailleurs avaient précédemment, durant tout un siècle, réussi à arracher aux pouvoirs publics (droit de grève, droit syndical, protection sociale, etc.) —, le mouvement des enseignants chercheurs, en Droit surtout, apparaît presqu’en porte-à-faux par rapport aux attentes générées par les discours tenus.
Ainsi, dans un choeur à deux voix, le jour du 2 février 2009 a été déclaré "jour de grève" : "l’université s’arrête" [2]. Malgré donc ces hiatus, tous — ou presque — se déclarent en grève ce jour [3].
Ces deux voix indiquent pourtant deux voies différentes d’un mouvement, l’une étant portée majoritairement par des juristes qui se sont lancés dans un schéma de négociation pacifiante pour les instances de pouvoir mais non apaisante pour ceux qui les suivaient dans leurs résolutions [4], l’autre rassemblant d’autres disciplines, plus généraliste, captant les contestations engagées par d’autres milieux universitaires contre la "mastérisation" des concours, contre les modifications des statuts des IUT, contre les réformes de la formation des professeurs d’école, contre la systématisation du quantitatif dans l’évaluation des enseignants, etc.
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Nul n’est obligé de dire à laquelle de ces deux voix ou de ces deux voies, il s’attache pour exercer son droit de participation à la grève, ce droit étant encore dans le cadre de l’enseignement supérieur conçu comme de nature collective et n’exigeant pas de chacun une déclaration préalable 48 heures auparavant...
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[1] Par exemple : le site de O. Jouanjan constitué pour regrouper l’information relative au projet de modification du statut ou le site de L. Valette, sur le "projet de décret modifiant le statut des enseignants-chercheurs". Mais, sur Toulouse, existait déjà le site des "personnels obstinément opposés à la loi Pécresse", dit Poolp.
[2] V. le Communiqué de SLU sur l’AG du 22 janvier 2009 et le Communiqué de presse de la coordination nationale des universités (31 janvier 2009).
[3] Mais, parce que le lien avec les mouvements sociaux n’a pas été formellement affirmé, "je" resterais circonspecte à cet égard, plus radicale dans la contestation parce que je militerais plus sûrement pour une révision de la loi LRU, et moins confiante dans la négociation qui s’averera indispensable, parce qu’elle donnera toujours aux "cumulards" du privé et du public, une place de choix en dépit du principe de l’exclusivité due à la fonction occupée dans le service public, principe qui garantit pour une large part "l’impartialité" à laquelle ont droit les usagers du service public en cause...
[4] Comment négocier une modification d’un projet de décret dont avait été pourtant demandé le "retrait" ?