Le 15 décembre 2012, par Geneviève Koubi,
Le décret n° 2011-476 du 29 avril 2011 portant création du Conseil national du numérique est abrogé... par le décret n° 2012-1400 du 13 décembre 2012 relatif au Conseil national du numérique. Plutôt qu’un décret modifiant le décret "portant création", le gouvernement a donc choisi recomposer un décret dont l’objet est le conseil lui-même.
La réflexion sur l’utilité des commissions consultatives initiée par la circulaire du Premier ministre n° 5618/SG du 30 novembre 2012 relative à la réduction du nombre des commissions consultatives a donc bel et bien été enclenchée. Il ne s’agit pas là de ’supprimer’ ledit conseil mais de le rationaliser. Toutefois, l’idée de "commission consultative à distance", qui aurait pourtant eu une certaine portée s’agissant justement du Conseil national du numérique, aurait peu de chances d’être mise en œuvre dans ce cadre... sauf si les séances de ce conseil se réalisaient en visioconférences. En effet, l’article 4 al. 2 du décret du 13 décembre 2012 précise clairement que « les membres du conseil ne peuvent pas se faire représenter. Est déclaré démissionnaire d’office par le président sur le rapport du secrétariat tout membre qui n’a pas participé à deux séances consécutives du conseil. »
.
Une comparaison entre les deux textes s’imposerait. La notice explicative du décret de 2012 annonce que « le décret élargit les missions du conseil à l’ensemble des questions posées par le développement du numérique. » Pourtant, sur ce point, les différences entre le décret n° 2011-476 du 29 avril 2011 (abrogé) et le décret n° 2012-1400 du 13 décembre 2012 relatif au Conseil national du numérique sont surtout de l’ordre des sous-entendus.
Au titre du décret du 29 avril 2011, « le Conseil national du numérique a(vait) pour mission d’éclairer le Gouvernement et de participer au débat public dans le domaine du numérique. / Il (pouvait) être consulté par le Gouvernement sur tout projet de disposition législative ou réglementaire susceptible d’avoir un impact sur l’économie numérique. / Il formul(ait) également de sa propre initiative des recommandations en faveur du développement de l’économie numérique en France et contribu(ait) aux réflexions prospectives sur ce secteur. » (art. 1)
Selon le décret du 13 décembre 2012,« le Conseil national du numérique a pour mission de formuler de manière indépendante et de rendre publics des avis et des recommandations sur toute question relative à l’impact du numérique sur la société et sur l’économie. / A cette fin, il organise des concertations régulières, au niveau national et territorial, avec les élus, la société civile et le monde économique. / Il peut être consulté par le Gouvernement sur tout projet de disposition législative ou réglementaire dans le domaine du numérique. » (art. 1)
Sans nul doute, la logique n’est pas identique — le modèle abscons de la concertation ( ?) y étant intégré —, même si, en fin de compte, les résultats, ou plus exactement l’exploitation des travaux du Conseil du numérique restent similaires... encore que l’élargissement annoncé dans la notice explicative reste mesuré. De fait, le spectre de la consultation du Conseil national du numérique sur tout projet de disposition législative ou réglementaire susceptible d’avoir un impact sur l’économie numérique (en 2011) est plus étendu que celui envisagé à propos de tout projet de disposition législative ou réglementaire dans le domaine du numérique (en 2012).
De plus, de toute évidence, quand bien même le programme annuel de travail du Conseil national du numérique serait « soumis à la consultation du public » par le biais de son site internet [1] puis, par la suite, « adopté dans une formation du conseil élargie à des parlementaires et à des personnes investies localement dans le développement du numérique » (notant que le pluriel renvoie à neuf personnes en tout) — comme le répète la notice explicative en référence à l’article 5 du décret de 2012 —, c’est toujours le gouvernement qui recueille les avis et recommandations, qui reçoit le rapport, qui en tirera alors ou non matière à réflexion ou à action.
.
Mais, en fait, la différence entre ces deux textes tient surtout à la composition du Conseil. La notice explicative du décret affiche ces quelques phrases qui résument les principales options gouvernementales : « Les règles relatives à sa composition sont modifiées en conséquence. Il est également prévu que cette composition devra respecter une parité entre hommes et femmes. »
Le décret du 29 avril 2011 prévoyait que le Conseil national du numérique comprenait dix-huit membres, nommés par décret du Président de la République pour deux ans (renouvelables), et « choisis en raison de leurs compétences dans le domaine de l’économie numérique. » (art. 2 et 3). De dix-huit personnes on passe à trente personnes, à quinze hommes et quinze femmes, toutes nommées « par décret du Président de la République sur proposition du ministre chargé de l’économie numérique » pour trois ans (renouvelables) : « Le Conseil national du numérique comprend, à parité entre chaque sexe, trente membres choisis en raison de leurs compétences dans le domaine du numérique. » Pourquoi donc tant de membres ?
.